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Une Souris et des Hommes
28 mars 2010

France/Guyane - C'est rare, non, la nostalgie ?

Parlons un peu de quelques groupes de personnes présentes en Guyane, à travers quelques anecdotes, réflexions et moments vécus. J'enrichis ces textes par quelques photos sans rapport.

>> Une pépite d'or pour la perle des Antilles

La Guyane possède tant par l'histoire que par l'actualité, certains liens forts avec Haïti, la "perle des Antilles" mais aussi un des pays les plus durement touchés par les catastrophes naturelles, dans un contexte de grandes difficultés pour sa population de satisfaire ses besoins de base. Malheureusement, notre Guyane n'est pas différente de tous les autres territoires, départements ou pays du monde, et j'ai compris à travers des discussions et la lecture des journaux guyanais qu'il existe au sein d'une partie de sa population une certaine méfiance voire une discrimination envers les Haïtiens. C'est toujours la même chose, quelque soit le territoire que j'ai côtoyé (la Suisse avec les Kosovars, l'Irlande avec les polonais): dès que dans un territoire donné une population étrangère ou d'origine étrangère est un peu trop nombreuse et un peu trop pauvre, elle est un peu trop mal vue et discriminée. J'ai vraiment le sentiment que c'est une réalité universelle. Aussi, dans le contexte d'explosion démographique que connaît la Guyane et avec toutes les difficultés et la peur que cela engendre, la politique d'immigration voulue par une partie de la population se devine facilement à travers les titres réguliers de l'hebdomadaire "la semaine guyanaise", avec l'exemple du N°1336 (août 2009): "Immigration: des chiffres et des affaires...Plus de 50 000 étrangers "non expulsables" en Guyane...Harpie fait chuter le nombre de reconduites!" Il est légitime que l'immigration fasse peur aux habitants de Guyane. Mais une autre chose est sûre, certains renvois sont terriblement injustes. Je vous laisse découvrir le blog lié dans la colonne de droite pour avoir un exemple frappant de ce qui peut se produire.

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Partie de football à Suzini, Cayenne

>> Le Monde doit respecter le Brésil

Phrase interpellante, et d'autant plus frappante qu'elle était le slogan du gouvernement fédéral lors d'une publicité coupant la comédie romantique hollywoodienne "Shall We Dance ?", dans laquelle l'homme d'affaire Richard Gere, riche, élégant, blanc, décidait de se mettre à danser...la question existentielle du film étant: "va t'il quitter sa femme pour sa prof de danse?" Drôle de moment, difficile confrontation entre la réalité d'Oiapoque et celle d'Hollywood. Oiapoque, nouvel an 08-09, une ville d'orpailleurs, une ville aux infrastructures pires que celles des favelas de Rio (d'après une copine de la ville des J.O), une ville aux nombreuses princesas sirotant une caïpirinha, se disant peut-être qu'elle voudraient être cette prof de danse quand certains Français se disaient peut-être vouloir devenir Richard Gere, au même moment, en Europe. Hollywood, symbole de la culture de masse occidentale, reflet du rêve américain et de tout ce qu'il peut générer, de l'espoir à la souffrance, de la souffrance au sourire, du sourire à l'espoir. Ces princesas, certaines s'en vont traverser la frontière pour espérer trouver leur Richard Gere guyanais ou métropolitain, et du moins pour essayer d'obtenir un avenir un peu plus doré. Ces personnes brésiliennes, c'est une chance que j'ai eu de les côtoyer, notamment le dernier mois à Kourou, et je retiendrai cette triste comparaison d'une copine du moment connaissant l'Hexagone et la Guyane: "Ici, les hommes sont bien moins respectueux de nous, les Brésiliennes, qu'en France." Drôle de couples, entre le chercheur européen venu participer aux projets de la base spatial, ou entre le légionnaire parfois aussi, et la femme brésilienne. C'est une des réalités de la ville spatiale de Kourou.

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Partie de football sous la pluie de Cayenne

>> C'est rare, non, la nostalgie ?

Ma dernière envie est d'écrire un petit mot pour ces princesses dominicaines, rencontrées au fil de l'année dans les rues de Cayenne, dont certaines ont une histoire proche de celle de Zulema, racontée dans "Princesas", film espagnol splendide, réalisé par Fernando Léon de Aranoa en 2005. Extrait choisi. 

 "Il y a un jour, tu verras, un jour où c'est le pied. Ce jour-là, tout se passe bien.Tu vois ceux que tu veux voir, tu manges ton plat préféré. Et tout ce qu'il t'arrive, c'est ce que tu veux qu'il t'arrive. Si tu allumes la radio, il y a ta chanson préférée. Et si tu vas à un jeu télévisé ce jour-là, tu remportes tout(...) Ecoute bien ce que je te dis: tout (...) Ce jour n'arrive qu'une fois, mais quand ? On doit être vigilante, il faudrait surtout pas le rater. C'est comme une déviation. Comme quand sur la route il y a une déviation. Mais tu es peut-être au téléphone, ou tu discutes ou tu as la tête ailleurs et tu t'en rends pas compte, et t'es baisée, parce que tu ne peux pas revenir en arrière. Ce jour là, c'est la même chose, une déviation. C'est très important, car tu peux décider du cours que les choses emprunteront ou pas: Le chemin nouveau ou pas."

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Arc-en-ciel, la vie est belle !

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21 mars 2010

France/Guyane - Dirty Paradise, pour introduire l'orpaillage

Dirty Paradise, de Daniel Schweizer, cinéaste genevois, est un documentaire de haute qualité cinématographique, parlant de l'orpaillage clandestin et ses conséquences sur la vie des amérindiens wayana dans le haut-Maroni. Ce film a été diffusé dans le cadre du festival du film et forum international sur les droits humains, et c'est avec un peu de plaisir mais aussi un peu de peine que je le découvrais en ce triste dimanche grisâtre de mars. Un peu de plaisir, car la qualité cinématographique de ce documentaire est indéniable. Des images splendides, des entretiens de qualité et un traitement du sujet plutôt complet. Et de la peine car la lutte contre ce fléau environnemental et sanitaire pourrait avoir des conséquences irréversibles pour les villages concernés, et pour l'environnement autrement préservé du territoire guyanais. Je suis revenu de Cayenne il y a maintenant quelques mois. Quelque soit l'endroit et le poste concerné, un contrat d'un an est court, très court, mais comme il me reste près de 40 ans à cotiser, des opportunités pour retravailler dans ce beau département habitées par de chouettes personnes, il y en aura probablement d'autres !  

Allez, je retranscris avec une précision approximative les grandes lignes du débat qui a suivi ce film et qui s'est déroulé en présence du réalisateur, de Michel, un amérindien wayana venu à Genève pour témoigner avec quelques autres compères, et de deux ou trois autres professionnels ayant consacré leur vie professionnelle au travail avec les petites communautés minoritaires au sein de nombreux pays en Europe, en Amérique du Sud ou ailleurs. Ce débat, d'environ 45 minutes, m'a semblé assez juste tant par les avis de Michel sur la situation des siens que par les réflexions sur les problèmes dans la vie de tous les jours des amérindiens du Haut-Maroni. J'en profite pour glisser quelques photos de cette région de Guyane, prises par mes collègues de l'époque. 

Lutter contre l'orpaillage: quelles solutions ? C'est la première question sur laquelle le débat a porté. Pour Michel, la lutte est quasiment impossible compte-tenu du statut international des eaux du Maroni, de la passoire totale que constituent les frontières de la Guyane, du nombre important de chercheurs d'or (peut-être 10 000 garimperos), de la sporadicité des opérations de l'armée (Anaconda, Harpie etc).

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Vue de Maripasoula (photo prise par mes anciens collègues)

Face à ces difficultés géographiques, tout le monde s'accorde à dire que la France ne pourra probablement pas s'en sortir seule pour supprimer ce fléau irréversible. Alors, quelles solutions ? la coopération, et pas qu'un peu. Cet argument, je l'avais déjà entendu régulièrement lors de ma présence en terre guyanaise. Une coopération renforcée entre les autorités françaises, brésiliennes et surinamaises. Il semblerait que ces opérations portent quelque peu leur fruit, et le président de la République Nicolas Sarkozy a dans ce sens confirmé que l'opération Harpie deviendrait permanente sur le territoire de la Guyane, alors que les négociations avec le Brésil pour une meilleure coopération sont en cours. Le débat souligne également l'opacité du circuit de l'or en Suisse, l'existence évidente de financeurs, réels mafieux tirant leur épingle du lot en exploitant la majorité de ces garimperos ouvriers à la simple recherche d'un avenir plus doré. Un milieu assez pourri, comme le synthétise cette dernière réalité: la Guyane exporte plus d'or qu'elle n'en produit ! 

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