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Une Souris et des Hommes
30 avril 2010

France/Guyane - 10,9,8,7,6,5,4,3,2,1...0

La visite du Centre Spatial Guyanais (CSG) offre l'opportunité de découvrir les salles de lancement ou encore le musée de l'espace qui retrace l'histoire de l'industrie spatiale européenne. Cette visite, gratuite (site industriel), est intéressante et permet d'accéder aux salles de lancement et autres bâtiments permettant l'envol des lanceurs Ariane 5. L'industrie du spatial apporte probablement à l'économie guyanaise et a abouti au développement urbain de la ville de Kourou. Une ville particulière, une fraction de l'identité guyanaise. Un autre exemple de cette diversité culturelle du département.

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Assister à l'envol d'une fusée est forcément marquant. Je pense notamment à ce premier vol, de nuit, où le ciel illuminé laissait découvrir une bande de flamme énorme, alors qu'un bruit assourdissant enveloppait mon tympan. Un moment mémorable. Ci-dessous quelques photos d'un deuxième vol auquel j'ai assisté durant cette expérience guyanaise.

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24 avril 2010

France/Guyane - De la forêt !

Le bassin amazonien s'étend sur 650 millions d'hectares de forêt primaire répartie entre 9 pays. Située au coeur de ce bassin, la forêt du plateau des Guyane revêt un intérêt écologique et biologique universellement reconnu. Comment le prendre en compte pour assurer le développement économique de la Guyane dans le cadre d'une coopération régionale Amapa-Guyane-Suriname-Guyana sans réduire les fonctions capitales de ces forêts tropicales? Cet article, dont certains éléments sont repris sur la description d'un projet financé par l'Agence Française de Développement (AFD) de Guyane, se veut une introduction sur le financement international de la protection/gestion/valorisation durable de l'environnement. Il est agrémenté par des photos d'une sortie en forêt, à la montagne des singes, vers Kourou. La montagne des singes: une belle promenade qui nous amène à un carbet avec une vue imprenable sur le littoral et l'intérieur de la Guyane...de la forêt, de la forêt, encore de la forêt ! 

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La forêt guyanaise, un morceau européen de l'Amazonie

L'Agence Française de Développement constitue l'organe français de distribution de l'Aide Publique au Développement, dans les Départements d'Outre-Mer et dans les pays dits "en voie de développement". Dans un monde de plus en plus globalisé, cette contribution financière, seule véritable politique publique à l'échelle internationale, peut avoir un rôle dans la protection de ces biens communs. Aussi, un apport financier du gouvernement français pour la gestion durable de la forêt du plateau des Guyanes prend tout sens. D'autres services de l'État prennent aussi en compte le financement de projets de développement local dont la prise en compte de critères environnementaux est importantes. On peut penser aux subventions de l'ADEME pour le financement de constructions publiques selon une architecture bioclimatique peu consommatrice d'énergie. Le financement du développement durable doit ainsi nécessairement prendre en compte ses trois composantes: la lutte contre la pauvreté, le développement sanitaire et social (santé, éducation), et la protection de l'environnement. Ainsi, l'aide publique au développement peut, par des actions ciblées et peu onéreuses, encourager des pays dits "en voie de développement", selon une expression critiquable, à réduire le rythme de la déforestation, aujourd'hui responsable de 20% des émissions mondiales de CO2. 

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Ce projet de gestion durable des forêts du plateau des Guyanes, mis en oeuvre par le WWF, qui concerne le Guyana, le Suriname, la Guyane et l'Amapa, comprend 6 composantes, dont la gestion des aires protégées, la réduction des impacts de l'orpaillage, la mise en place d'une gestion forestière durable, la gestion et la conservation des écosystèmes aquatiques, la gestion et conservation des espèces, et une composante de communication et d'éducation à l'environnement. Aussi, la préservation des ressources naturelles, la réduction des effets négatifs des activités économiques, la préservation des services environnementaux ainsi que des savoirs et techniques des habitants des pays et de la Guyane sont autant d'éléments qui contribuent au développement socio-économique de la région. En matière environnementale, le projet contribue à la préservation de la biodiversité encore intacte de la zone.

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Ce projet est un bel exemple de ce que ce petit livre accessible à tous traite: le financement du développement international. A l'heure du bilan de cette expérience professionnelle et personnelle, certaines réflexions sur ce que j'ai pu comprendre, notamment en travaillant avec deux ingénieurs civils guyanais qui m'auront fait aimé ce département, me semblent intéressantes à être échangées.

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"La constatation que la Chine est devenu le premier pays émetteur de CO2 au monde ne doit pas faire oublier la responsabilité historique des sociétés industrialisées dans la consommation de ressources naturelles finies et la dégradation de l'environnement mondial. Ainsi, les émissions de CO2 de la Chine ont beau avoir dépassé celles des Etats-Unis, ses émissions par habitant restent encore très inférieures à celles des sociétés développées: moins de 4 tonnes de CO2 contre 20 tonnes par Nord-Américain, 10 tonnes par Japonais ou Allemand". Une première conclusion très simple est à mettre en valeur: dans les sociétés "développées" du Nord, il existe des disparités réelles entre les productions de gaz à effet de serre et l'empreinte écologique moyenne des pays. Un danois, soumis à une flexsécurité du travail et allant à son travail en vélo se sent-il pour autant moins heureux qu'un américain sans assurance-santé de qualité et qui utiliserait régulièrement de l'eau pour laver sa voiture? L'irlandais de 2010, vivant dans un pays devenu un des plus riches d'Europe en 20 ans, est il réellement contrarié de ne pas avoir d'autoroute 4 voies reliant Dublin à Galway, mais au contraire des routes simples, plus proches des pays dits "en voie de développement"? Il existe autant de modèle de développement qu'il existe de pays et la qualité de vie voire la croissance dans un pays n'est pas directement lié au niveau de développement de ses infrastructures. 

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La naissance de la politique d'aide au développement est souvent datée par le plan Marshall, qui oeuvra à la reconstruction des pays d'Europe de l'Ouest après la seconde guerre mondiale. W.W Rostow, dans son livre intitulé Les étapes de la croissance - Un manifeste non communiste, exprimait les différentes étapes de développement d'un territoire, de la société traditionnelle à l'ère de consommation de masse.

>> Prochaine étape: développement durable, décroissance, crise majeure, guerre?

La prise en compte de la composante environnementale tant dans les modèles de développement territoriaux que dans la vie de chaque individu devientindispensable en Occident et dans les pays industrialisés. Bien plus qu'une tendance à la mode, elle passe tant par l'orientation des politiques publiques vers un financement de projets durables (consommations énergétiques, énergies renouvelables, mobilité douce, agrandissement des parcs naturels, réduction des consommations d'eau etc) que par une évolution des moeurs à l'échelle individuelle. Car comme l'idée de base de la micro-finance d'assurer le développement d'un territoire à partir du financement de l'entrepreneur individuel du PVD, c'est aussi l'évolution des comportements à l'échelle individuelle qui aura des conséquences sur le développement durable d'un territoire dans son ensemble, et cette évolution sera d'autant plus forte si elle a impact limité sur le portefeuille de chaque individu ! Dans une Europe où nombre de sourires sont partis avec le précédent métro, dans une Europe en recherche d'identité et de sens, nombre de démarches collectives et individuelles se mettent en place, à l'image de cette démarche de covoiturage intéressante d'un ami annécien ou à celle d'une amie de ne plus manger de viande le soir pour limiter les gaz à effets de serre, provenant de son intestin comme de ceux de la vache :).

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Comment faire pour que la planète supporte 8 milliards d'individu sans que de graves conflits, voire une guerre mondiale, apparaissent? Quand un débat sur l'identité nationale en France est lancé dans une visée électoraliste alors que si le niveau de l'océan monte vraiment, l'Europe devra se serrer les coudes pour accueillir bien plus de monde et le Monde se brasser de plus en plus, va t'on encore nous baratiner sur des discours nationalistes à visée électoraliste? Quand va t'on réellement apprendre aux métropolitains que d'autres concitoyens peuplent le Monde, ou encore que dans le passé, des ultramarins ont eu des postes très importants dans le gouvernement? Pourquoi ne pas parler de la malbouffe américaine, qui elle, a un réel effet sur la santé et la diminution des identités culturelles européennes? Bref, passons et revenons à des extraits de ce livre. "Les sociétés en développement occupent une place centrale dans la crise environnementale globale à un troisième titre: en tant que pourvoyeur de solutions. En effet, c'est en partie sur leurs territoires - qui abritent l'essentiel des "puits à carbone", des réserves de biodiversité et des sources inexploitées d'énergie propre à la planète - que se mènera demain la bataille écologique. Celle-ci est déjà engagée: des projets sont par exemple en cours pour favoriser l'exploitation durable des forêts tropicales grâce à des rythmes de coupes d'arbres compatibles avec la régénérescence des espèces végétables et la préservation de l'habitat des espèces animales. (...) Pour être victorieuse, cette vaste bataille pour l'avenir de la planète devra être menée via une collaboration active entre pays du Nord et du Sud. Car ces derniers hébergent, il ne faut pas l'oublier, l'essentiel du patrimoine environnemental menacé. La protection du patrimoine naturel qu'ils hébergent vaudra à certains pays en développement des ressources considérables sur longue période qui, intelligemment investies, pourront alimenter la croissance économique. Ce type de collaborations Nord/Sud est ce qui permettra aux voies de développement de s'émanciper des trajectoires de croissance non soutenables empruntées par les sociétés industrialisées". Ok, cet extrait peut être une source de débats légitimes et "violents", car l'Occident reste le principal pollueur, et les solutions doivent tout d'abord venir de changements importants en Amérique du Nord et en Europe. Mais développement et conservation de l'environnement ne sont pas incompatibles. Le Costa-Rica, pays développé d'Amérique latine, propose un modèle de développement particulièrement intéressant. L'ensemble de ses parcs nationaux et réserves environnementales représentent 26% de la surface de son territoire ! Voilà une synthèse de ce leadership mondial dans le développement durable, assurant la préservation de ses ressources naturelles et un écotourisme apportant des ressources financières indéniables. Un pays stable, démocratique, et dont la suppression constitutionnelle de l'armée en 1949 a permis l'apport de nouveaux financements pour la conservation de son environnement. Un modèle pour le futur ? 

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10 avril 2010

France/Guyane - Excursion aux marais de Kaw

Les marais. Nom à connotation péjorative chez nombre de personnes. Dans l'imaginaire populaire européen, n'étaient-ils pas associé à la maladie, l'insalubrité, aux moustiques voire au banditisme? D'où un certain nombre de mesures pour les détruire sur le vieux continent, avant que leurs multiples valeurs soient enfin comprises. Mais revenons à nos marais de Kaw, qui forment une des six réserves naturelles crées par l'État en Guyane. Cette réserve est la troisième plus grande de France de par sa superficie (94700 hectares) après celle des terres australes et celle des Nouragues (Guyane), et la plus vaste zone humide de France. Elle a été crée le 13 mars 1998 par décret à cheval sur les communes de Roura et Regina et englobe le petit village de Kaw. Etant classée comme Zone Humide d'importance internationale (convention RAMSAR), elle est aussi connue pour son fort endémisme et sa biodiversité exceptionnelle.

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Emplacement des marais de Kaw (carte provenant du site web de la réserve)

Après avoir parcouru la longue route menant de Roura à Kaw, le genre de route dont on se demande si elle a une fin, nous voilà arrivant à 9h00 à l'embarcadère des marais de Kaw, où nous attendent un guide et un couple de métros bien sympas. Du 05 août à 9h00 au 6 août à la même heure. 24 heures pour visiter le petit village de Kaw, remonter le canal drainant la savane, photographier les zébus, oiseaux typiques, espérer voir un caïman, discuter avec les guides passionnés, puis s'endormir, écouter le bruit des marais et de la forêt...et se réveiller, au milieu de vagues d'humidité réveillant tous les habitants du marais...puis repartir.

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Embarquement dans la pirogue...

La visite de la maison du marais permet la présentation des différents écosystème présents. La montagne de Kaw est formée, sur un plateau du sommet, d'une végétation basse qui devient haute et dense sur les versants souvent abrupts. Forêt typique intacte, la montagne de Kaw regroupe un certain nombre d'espèces endémiques. Toutefois, les marais et savanes couvrent l'essentiel de la réserve. Au centre de la plaine de Kaw, le marais que nous allons remonter, puis autour, des savanes arbustives plus ou moins inondées selon la pluviométrie et la période de l'année. N'oublions pas également les forêts marécageuses, qui forment souvent d'étroits couloirs le long des cours d'eau guyanais. Dans un premier temps, c'est le petit village de Kaw que nous visitons.

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Puis voilà notre petite équipe débutant la remontée des marais, en découvrant la faune et la flore, tout en discutant des mesures de gestion et des liens entre l'homme et les marais, notamment à travers la pêche de l'Atipa. La remontée nous permet de découvrir nombre d'oiseaux typiques, tout comme cet élevage extensif de zébus. Un beau troupeau, un des rares troupeaux de bovins en Guyane.

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Ces zébus vivent dans les zones de savane, en cours de drainage naturel en ce début de saison sèche, et au milieu des moucou-moucous, plante invasive qui a la particularité d'avoir une fleur thermogène (produisant de la chaleur), comme toutes les aracées. Une plante agréable à l'oeil, mais dont l'impact sur l'écosystème de la plaine de Kaw est à évaluer. 

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La remontée se poursuit à travers un très beau paysage de savane et de forêt. Nombre d'espèces d'oiseaux sont observables: aigrettes, cormorans, nombreux passereaux, ou encore les hoazin huppés, oiseaux dont les juvéniles possèdent des griffes les aidant à s'accrocher, tels certains oiseaux préhistoriques (photo 1 et 2: caciques cul-jaune, photo 3: grandes aigrettes, photo 4: moucherole à tête blanche, photo 5: hoazin, photo 6 et 7: cormorans viguas)

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La remontée nous permet d'arriver au splendide carbet flottant et d'y déguster un ti-punch ainsi qu'un délicieux repas composé de plats guyanais. Installation dans le hamac, baignade, et sieste sont ensuite aux programmes de cette splendide journée.

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Une nuit en hamac s'attend à nous, mais avant, profitons de l'après-midi !

L'après-midi débute par la remontée de la crique Wapou, l'une des sources des marais, puis de profiter pleinement du carbet, en se baignant, en observant, en pédalant sur les vélos flottants à disposition.

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Coucher de soleil sur les Marais de Kaw

La nuit arrive et nous permet alors de vivre une très belle expérience: la découverte des caïmans. Les caïmans sont courants dans la réserve. Il en existe plusieurs espèces: le caïman à lunettes, le plus commun autour de la zone touristique, qui possède une aire de répartition large, du Mexique au nord de l'Argentine. On le retrouve en Guyane dans des milieux très variés, y compris dans les retenues des agglomérations du littoral, tels que les salines de Montjoly. Une autre espèce est le caïman noir, gravement menacé à cause de sa chasse intensive pour sa peau, et dont la présence dans les marais de Kaw est totalement protégée. C'est sur une pirogue que nous partons à la recherche de caïmans, autour du carbet duquel nous plongions dans la même journée :). La solution pour les attraper ? Les éblouir avec les lampes-torches, sans les laisser s'échapper de la lumière. Après quelques petites captures de petits spécimens, notre guide, arrêté au bord du canal, s'exclame d'un coup: "un caïman avec un anaconda dans la gueule". Dans ce moment mémorable, mon imagination débordante d'envie me laisse imaginer ça:

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"Un caïman avec un anaconda dans la gueule !"

La réalité est toute autre...un petit caïman à lunette ayant attrapé un petit serpent d'eau. Les arrêts sur les berges sont fréquents, et après avoir attrapé un petit spécimen, notre guide part pieds-nus sur la rives pour revenir avec un animal de taille respectable...qu'il nous laisse prendre ! Drôle de sensation, beau souvenir et peu voire pas de risques, l'animal restant immobile...mais attention tout de même à ne pas laisser traîner ses mains ! 

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Puis vint une nuit très agréable dans ces hamacs au coeur des marais, puis ce réveil inoubliable au milieu d'une brume mystérieuse, qui affirme cette sensation d'une Guyane envoutante et sauvage.

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Une atmosphère particulière qui me rappelle, 8 mois après cette excursion, l'émotion qu'elle a pu généré. La visite des marais de Kaw est une étape intéressante d'un séjour en Guyane, elle réserve de belles découvertes et une nuit en carbet très agréable. La savane étant inondée en saison des pluies, il est parait-il intéressant d'y retourner à cette période et d'avoir une autre vue sur ce biotope. Malheureusement, le point négatif de cette sortie est le prix d'une excursion. les 24 heures avec nuit en carbet flottant coûte tout simplement...150 euros/personne. Le coût d'une visite de la Guyane: un des facteurs limitant tant les habitants du département que le touriste amateur d'Amazonie.  

4 avril 2010

France/Guyane - L'orpaillage illégal, vu par la presse guyanaise

L'orpaillage illégal en Guyane est particulièrement médiatisé pour la double pollution qu'il génère: matières en suspension et mercure. Il n'est pas rare également d'entendre parler, dans certains documentaires, de l'insécurité liée aux attaques de mines légales par des garimperos. L'opération Harpie 2 a eu lieu en 2009. "La semaine guyanaise" a écrit de nombreux articles. Extraits choisis.

N°1332, 4-10 juillet 2009. "C'est une guerre des nerfs, une guerre d'usure que vit Saint-Elie. D'un côté, les gendarmes, constamment présents, à 9 ou 10, selon la relève. De l'autre les travailleurs clandestins de l'or qui - apparemment - ont déserté le bourg. Parmi ces étrangers en situation irrégulière, certains vivaient sur Saint-Elie depuis plus de 10 ans et pas exclusivement des Brésiliens. Avec ces dernières années, comme unique activité économique, l'orpaillage clandestin, ses commerces, ses emplois et son marché noir. "A leur arrivée mi-avril, les gendarmes ont d'abord mené une campagne d'information en prévenant les gens", raconte Rose Alexander, ancienne adjointe au maire, ex-agent de santé au dispensaire fermé depuis janvier 2006. Elle revient régulièrement dans la commune dont elle est originaire et possède une maison. J'ai vu trois phases de reconduite ces dernières semaines. Une fois les gendarmes en ont pris 20, une fois 12, une fois 17. En fait, ce sont les brésiliens qui viennent se livrer", indique-t-elle. Ce qu'un gendarme confirme: la plupart viennent d'eux mêmes car ils ont faim. On ne court pas après. Dans le bourg, une poignée de Brésiliens (à priori moins d'une vingtaine) restée sur place, connaît la chanson: "Segunda feira, seixta feira!": "lundi et vendredi" sont les deux jours de reconduites à partir de Saint-Elie. On les ramène en camion sur Petit Saut puis en pirogue", explique un gendarme. "Je suis venu me rendre", nous a indiqué, dimanche 28 juin, un Brésilien qui cueillait des oranges en attendant le lendemain. Selon les informations recueillies sur place, bon nombre d'illégaux se sont spontanément livrés pour repartir gratuitement au Brésil. (...)

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Lac artificiel de Petit Saut. Nombre de sites d'orpaillage sont en amont.

Echange entre Frédéric Farine, journaliste, et une femme garimpero. "En forêt, nous avons tous le palu, à tour de rôle. J'ai eu encore une crise, il y a huit jours. Il ne nous reste qu'une tablette d'Artecom au camp. A la prochaine crise de l'un d'entre nous, plus de tablette." explique t'elle un brin fataliste. J'interroge Latidinia sur cette propension des ressortissants brésiliens à choisir l'aventure en Guyane. "Il faut comprendre les difficultés des classes défavorisées au Brésil. Qu'est-ce qu'il est possible de faire au Brésil pour des hommes qui ne savent ni lire ni écrire? De la maçonnerie, des charpentes: des travaux très mal payés là-bas. C'est une amie d'Altamira, ma ville d'origine au Para, qui m'a parlé de la Guyane en 2004" raconte encore Latidinia. "Elle venait d'en être expulsée après y avoir passé 2 ou 3 ans. Elle y vendait des vêtements, de la nourriture pour les sites d'orpaillage. Cela a bien marché pour elle en Guyane".

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Lac de Petit Saut - Forêt noyée lors de la mise en eau du barrage

N° 1337 du 8 au 14 août 2009. Entretien entre ce même journaliste et un orpailleur du village clandestin de Zohia (région de Saul), secteur illustré sous le nom de "guérilla". "La plupart des gendarmes sont très bien entraînés, très bien éduqués. Mais pour une minorité d'entre eux, ce n'est pas le cas. Enfin, c'est sûr, ils ne sont pas violents, ils n'ont jamais tués personne sur un site" reprend Janilton qui explique travailler dans le secteur de Guérilla "depuis 2006". Pour lui, Guérilla n'existe plus. Alors qu'un an en arrière "en comptant l'ensemble des sites de ce secteur, on pouvait produire 12 à 15 kilos d'or en une journée! C'est fini maintenant. Et tout est cher ici.(...) Sur le problème de la violence entre garimperos sur Guérilla, Janilton dément: "il n'y a pas de violence, pas de meurtres à Guérilla, les villes de Guyane sont plus violentes que les sites d'orpaillage." Une affirmation contredite par l'instruction judiciaire en cours sur les crimes de Guérilla. "On a retrouvé 6 à 7 cadavres, dont certains abattus de balles dans le dos en 2007 et 2008" souligne une source judiciaire. Tout au plus, Janilton admet-il "des accidents, nombreux, dans les galeries qui s'effondrent". La galerie la plus profonde creusée à Guérilla ? "32 mètres", indique t'il.  On apprend sur place comment les faire, puis on creuse à la pelle et à la pioche...Au Brésil, j'étais "motoboy" je faisais des courses en scooter pour une boutique à Manaus avant de venir en Guyane. Mais je refuse que mes frères viennent, c'est trop dur" poursuit-il. Sur la question écologique, Janilton a une parade: "Si on nous laissait faire, à notre départ, il n'y aurait ni trace de notre passage, ni de notre corotel (village d'orpailleurs)."(...) Sa présence en Guyane ? Il l'explique par le manque de perspective chez lui: "Au Brésil, il y a des terres avec de l'or mais le gouvernement n'autorise pas les garimperos à l'exploiter. J'ai étudié mais je n'ai pas eu l'opportunité d'avoir un bon travail dans mon pays" regrette-t-il.

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Village sur le rivage brésilien de l'Oyapock. Un corotel ?

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